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L’étude de dangers (EDD) est un élément obligatoire pour les installations industrielles classées pour la protection de l’environnement (ICPE) et requis lors du dépôt de demande d’autorisation d’exploiter. Elle vise à identifier et évaluer les risques d’accident majeur associés à ces installations, que ce soit en fonctionnement normal, transitoire ou accidentel.
Contexte réglementaire
Les obligations liées à l’étude de dangers sont régies par plusieurs textes et directives, tant au niveau européen que national.
La directive européenne SEVESO III, entrée en vigueur le 1er juin 2015 et déclinée en France au travers du code de l’environnement, établit des règles pour la prévention des accidents majeurs impliquant des substances dangereuses et la limitation de leurs conséquences pour la santé humaine et l’environnement. La réglementation prend en compte le régime de classement de l’établissement pour établir les exigences concernant l’étude de dangers. Ainsi, dans le cadre du processus d’évaluation des risques de l’étude de dangers et suivant le régime de classement, des exigences spécifiques sont applicables.
Une étude de dangers doit être réalisée lors de la création d’une nouvelle installation industrielle dont l’activité et les substances ou mélanges dangereux la font relever du régime de l’autorisation. Elle doit ensuite être mise à jour dans les cas suivants :
- Passage de l’installation au régime de l’autorisation (en cas de modification de la nomenclature des Installations Classées) ;
- Tous les cinq ans pour les établissements SEVESO Seuil Haut ;
- Modification d’une installation existante (soumise à autorisation ou SEVESO) dès lors que cette modification est jugée « notable » par le préfet, c’est-à-dire entraînant des dangers ou inconvénients significatifs pour les intérêts mentionnés aux articles L.211-1 et L.511-1 du code de l’environnement ;
- Demande par l’administration en cas d’évolution de l’état de l’art et des connaissances, d’augmentation du risque rendant l’étude de dangers existante inadaptée ou d’occurrence d’un accident dans l’établissement.
L’article R.512-9 du code de l’environnement expose le principe de proportionnalité en précisant que « le contenu de l’étude de dangers doit être en relation avec l’importance des risques engendrés par l’installation, compte tenu de son environnement et de la vulnérabilité des intérêts mentionnés aux articles L.211-1 et L.511-1 du code de l’environnement ». Le principe de proportionnalité, tel qu’énoncé, est complexe à appliquer selon des règles uniformes à toutes les installations industrielles. Par conséquent, les méthodes de gestion des risques sont utilisées pour mettre en œuvre ce principe.
Comment évaluer si un scénario est acceptable ?
L’objectif principal de l’étude de dangers est de démontrer la maîtrise des risques d’accident majeur associés aux installations et aux activités industrielles. En France, l’EDD est un outil réglementaire qui s’inscrit dans une démarche de gestion des risques en vue d’obtenir une autorisation d’exploiter dans les conditions décrites dans cette étude de dangers. Elle est réalisée sous la responsabilité de l’exploitant.
L’EDD permet d’identifier les risques auxquels l’installation peut exposer les intérêts visés par l’article L.511-1 du code de l’environnement (voisinage, santé publique, protection de l’environnement…), que la cause soit interne ou externe à l’installation. À travers ce document technique, l’exploitant doit identifier les scénarios d’accidents majeurs et établir la performance des mesures de maîtrise des risques.
L’EDD s’inscrit dans un processus itératif de gestion des risques, visant à réduire les risques à un niveau jugé acceptable. Cela inclut :
- L’identification des sources de dangers ;
- L’analyse des conditions dans lesquelles ces dangers peuvent se matérialiser ;
- Et la caractérisation des risques selon plusieurs critères tels que la gravité des conséquences et la probabilité d’occurrence.
Déterminer le niveau de gravité sur les enjeux humains revient à évaluer l’atteinte potentielle des personnes par les effets d’un phénomène dangereux. Ce niveau est mesuré grâce à une ou plusieurs modélisations qui combinent l’intensité des effets (toxiques, de surpression ou thermiques) à la vulnérabilité de la zone potentiellement dangereuse. Le nombre de personnes susceptibles d’être affectées par les effets des phénomènes dangereux du site peut ainsi être déterminé (exemple : niveau estimé « sérieux » si au plus 1 personne est concernée dans une zone délimitée par le seuil des effets létaux du phénomène).
La probabilité d’occurrence est ensuite évaluée. Elle est soit estimée de manière quantitative (par unité et par an), soit de manière qualitative, sur la base d’un retour d’expériences (exemple : probabilité D = « évènement très improbable », s’est déjà produit, mais a fait l’objet de mesures correctives réduisant significativement la probabilité de ce scénario).
Ainsi, des scénarios présentant une gravité importante (exemple : effets thermiques au delà des limites de propriétés) peuvent tout à fait être considérés comme acceptables si leur probabilité d’occurrence est faible. C’est dans ce cadre que sont caractérisées les mesures de sécurité à mettre en œuvre.
En reprenant les exemples cités précédemment, la grille ci-dessous montre qu’un scénario avec une probabilité D (très improbable) et présentant une gravité des conséquences « sérieux », se positionne dans la zone verte = « risque moindre ».

Figure : grille d’appréciation du niveau de maîtrise du risque en termes de couple probabilité — gravité
Ensuite, l’évaluation des risques consiste à comparer le niveau de risque résiduel à un niveau jugé acceptable, correspondant aux zones de la grille MMR associées à un niveau de risque moindre ou intermédiaire.
Si les scénarios étudiés sont jugés acceptables, le risque est considéré comme maîtrisé.
Les mesures de sécurité pour rendre un scénario acceptable
Des mesures techniques, organisationnelles et humaines doivent être mises en place pour maîtriser les risques sur l’établissement, en prenant en compte les pratiques et techniques disponibles ainsi que leur coût.
Les barrières de sécurité ou les mesures de maîtrise des risques visent à limiter la probabilité d’occurrence ou à réduire les effets des risques des accidents potentiels. Plus ces barrières sont nombreuses, performantes et indépendantes, plus la probabilité que les enjeux soient exposés à des effets notables est faible.
Pour résumer
L’étude de dangers est un document obligatoire dans le cadre de la démarche de demande d’autorisation d’exploiter des installations classées.
Elle sert à identifier et à évaluer les risques d’accident majeur. S’inscrivant dans un processus de gestion des risques, elle permet d’estimer la gravité des conséquences et la probabilité d’occurrence des phénomènes dangereux. Il est important de noter qu’un scénario, même s’il présente une gravité importante, peut être considéré comme acceptable si sa probabilité d’occurrence est jugée faible.
Selon les résultats de cette évaluation, des mesures techniques et organisationnelles doivent être mises en place pour maîtriser les risques et réduire leur impact.
L’EDD vise à démontrer que le projet permet d’atteindre un niveau de risque aussi bas que possible, dans des conditions économiquement acceptables, compte tenu de l’état des connaissances et des pratiques, ainsi que de la vulnérabilité de l’environnement de l’installation.
